Responsabilité décennale et immixtion du maître d'ouvrage
Exonération de la responsabilité décennale liée à l'immixtion du maître d'ouvrage
La responsabilité décennale pèse automatiquement sur le constructeur en cas de désordre, sauf s'il peut prouver que ces dommages résultent d'une cause étrangère, souvent imputée à l'immixtion fautive du maître d'ouvrage. Cet article examine une décision récente de la Cour de cassation.
Responsabilité décennale du constructeur
Selon l’article 1792 du Code civil, la responsabilité décennale repose sur le constructeur, sans que le maître d'ouvrage ait besoin de prouver une faute. Il lui suffit de démontrer que les désordres sont imputables aux travaux. Pour s'exonérer, le constructeur doit prouver que les désordres trouvent leur origine dans une cause extérieure à lui-même, généralement une faute du maître d'ouvrage.
L’immixtion du maître d'ouvrage comme cause exonératoire
L'immixtion fautive se produit lorsque le maître d'ouvrage dépasse son rôle en prenant des décisions techniques ou financières qui interfèrent avec les travaux. Cependant, pour que cette cause exonératoire soit valable, il est nécessaire que le maître d'ouvrage ait une compétence reconnue en matière de construction.
La décision de la Cour de cassation
Dans l’arrêt du 13 février 2020 (Cass. civ. 3, n° 19-10.294), la Cour de cassation rappelle que la seule immixtion du maître d'ouvrage n'exonère pas le constructeur. En effet, la responsabilité ne peut être partagée que si le maître d'ouvrage est compétent et conscient des implications techniques de ses choix. Dans cette affaire, le maître d'ouvrage avait exigé des modifications qui ont contribué aux désordres de l’ouvrage. Cependant, la cour d'appel n'avait pas démontré que le maître d'ouvrage était notoirement compétent en matière de construction, d’où l'annulation partielle du jugement.
Vigilance des entreprises face aux demandes du maître d'ouvrage
Cette décision souligne la difficulté pour les constructeurs de faire valoir une exonération de leur responsabilité décennale. Il est donc crucial pour les entreprises de rester vigilantes face aux demandes du maître d'ouvrage présentant des risques techniques, et de refuser les modifications jugées inadaptées.
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