ACTION EN DEMOLITION : LA SANCTION DOIT ETRE PROPORTIONNEE AU DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE ET FAMILIALE ET DU DOMICILE Civ. 3e, 16 janv. 2020, n° 19-10.375
30/03/2020 16:12
Sur le fondement de l’article L. 480-14 du code de l’urbanisme, une commune peut saisir le juge judiciaire en vue de faire ordonner la démolition ou la mise en conformité d'un ouvrage édifié sans autorisation d’urbanisme et ou en violation du plan local d’urbanisme :" La commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme peut saisir le tribunal judiciaire en vue de faire ordonner la démolition ou la mise en conformité d'un ouvrage édifié ou installé sans l'autorisation exigée par le présent livre, en méconnaissance de cette autorisation ou, pour les aménagements, installations et travaux dispensés de toute formalité au titre du présent code, en violation de l'article L. 421-8. L'action civile se prescrit en pareil cas par dix ans à compter de l'achèvement des travaux. "
Lorsque la construction édifiée est utilisée aux fins d’habitation, l’action introduite sur le fondement de ces dispositions peut conduire à l’expulsion des occupants.
Dans l’affaire commentée, une propriétaire a construit un chalet en bois, où elle vit avec son conjoint et leurs enfants, alors que le terrain est classé en zone naturelle par le plan local d’urbanisme. La commune les assigne pour obtenir leur expulsion, ainsi que la démolition des constructions. La Cour d’appel a ordonné l’expulsion et la démolition de la construction illégale.
Le couple s’est donc pourvu en cassation et fait grief à la Cour d’appel de ne pas avoir recherché si la mesure de mise en conformité ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale et du domicile des personnes en cause, protégé par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt. Il appartient donc au juge avant de prononcer des mesures d’expulsion et de démolition, dans le but de faire respecter des dispositions légales d’intérêt général, d’exercer contrôle de proportionnalité.
Ainsi, en matière de violation des normes d’urbanisme, la Cour de cassation confirme une nouvelle fois qu’un contrôle de proportionnalité est nécessaire, afin de ne pas compromettre le droit au respect de la vie privée et familiale et du domicile des personnes concernées. Cette approche s’inscrit dans la même que celle de la chambre criminelle. Cette dernière a jugé que la démolition d’une maison d’habitation ordonnée sur le fondement de l’article L. 480-5 du Code de l’urbanisme sans répondre aux conclusions du prévenu selon lesquelles cette mesure porterait une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale et à son domicile, en ce qu’elle viserait la maison d’habitation dans laquelle il vivait avec sa femme et ses deux enfants, et que la famille ne disposait pas d’un autre lieu de résidence malgré une demande de relogement (Cass. crim., 31 janv. 2017, n° 16-82.945).
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